Comprendre la valeur de l'orientation patient
Dans quelle mesure êtes-vous capable de mener à bien vos activités
sociales habituelles ? Pouvez-vous continuer à travailler ? Comment
vos troubles du sommeil affectent-ils votre capacité à vivre en
famille ? Avez-vous l'impression d’aller mieux ?
Si ces questions peuvent sembler inhabituelles, les réponses sont
essentielles pour comprendre le fardeau que représente la maladie pour
le patient, ou encore pour mieux évaluer l’impact d'un traitement sur
sa qualité de vie.
Nous nous sommes entretenus avec Katy
Benjamin, directrice de la Recherche en économie de la santé et
résultats, pour comprendre le rôle de la recherche centrée sur le
patient au sein d’AbbVie.
Dans ce rôle, Kathy cherche à
savoir ce que pensent et ressentent les patients, combinant ces
précieuses informations à des données cliniques plus traditionnelles.
Cette approche globale du patient aide à mieux comprendre le fardeau
de la maladie et la manière dont nos molécules et médicaments peuvent
l’alléger, afin de mettre au point, à terme, de meilleurs traitements
pour les patients.

Vous faites partie du centre de recherche centrée sur le patient chez AbbVie, au sein du département d’Économie de la Santé & Résultats thérapeutiques (HEOR). Pouvez-vous nous expliquer ce que tout cela signifie vraiment ?
Katy Benjamin : Le rôle de l’équipe Recherche Centrée sur le
Patient consiste à s’assurer que la voix du patient tienne une place
centrale chez AbbVie. Par exemple, en nous assurant d’identifier les
besoins médicaux non satisfaits qui comptent réellement pour les
patients, en se basant sur leur feedback. Mais aussi, en faisant en
sorte que les études cliniques mesurent ces paramètres.
C’est par exemple le rôle des résultats déclarés par le patient
(patient reported outcomes ou PRO), un instrument clé pour mesurer
leur expérience. Ils peuvent être évalués dans le cadre d’essais
cliniques (avant la mise sur le marché), mais aussi en situation
réelle (après mise sur le marché) : on parle alors de données
empiriques (RWE). Celles-ci jouent un rôle de plus en plus important
pour nous permettre de comprendre la complexité des maladies et leur
fardeau pour les patients. Nous devons ancrer nos programmes dans le
monde réel afin de mieux comprendre l’expérience du patient.
Que peut-on apprendre de l’expérience du patient ?
Katy Benjamin : Cette question touche à l’une de mes passions
personnelles, autrement dit écouter réellement ce que le patient a à
dire. Si l'on observe l’histoire de la mise au point des médicaments,
on constate que la voix des patients n’est généralement pas prise en
compte. Nous nous sommes plutôt concentrés sur l’avis de la communauté
médicale et les résultats cliniques : rétrécissement de la tumeur ou
évolution d’une valeur en laboratoire, par exemple.
Mais
il se peut que les patients ne remarquent pas ce type de résultat
clinique. À l’inverse, il se peut qu'ils aient d’autres expériences
que nous ne connaissons pas, à moins de leur demander. Un excellent
moyen de favoriser la recherche centrée sur le patient consiste à
travailler avec des associations de patients. Cela peut, par exemple,
nous aider à découvrir l’existence d'un symptôme que les malades
ressentent et que les cliniciens ignorent, parce qu’ils se concentrent
sur un symptôme plus visible. Ou encore, nous aider à mieux comprendre
quels symptômes doivent être mesurés en priorité parce qu’ils
impactent des aspects de la vie des patients qu’ils jugent importants.
Par exemple, une étude clinique peut mesurer l’impact d’un traitement en polyarthrite rhumatoïde sur l’inflammation des articulations telle que détectées sur une radio. Mais en écoutant le patient, on se rendra compte que d’autres symptômes sont peut-être plus importants encore pour lui : par exemple, la fatigue, ou la raideur matinale.
Ces données qui portent sur la manière dont les patients perçoivent leur état, leur traitement et leur participation aux études cliniques sont importantes pour nous, en tant que société pharmaceutique, mais aussi pour les autorités de la santé telle que l’Agence européenne des médicaments (AEM). Les autorités reconnaissent de plus en plus la valeur des résultats déclarés par les patients, et en tiennent compte pour établir l’efficacité et l’intérêt d’un traitement.
En résumé, une recherche centrée sur le patient part du principe que le patient est le mieux placé pour exprimer comment il se sent, ce qui lui pèse, et ce qui le ferait aller mieux.