Par le Dr. Mark Mckee
Vivre à notre époque est une véritable chance. Les approches thérapeutiques disponibles pour aider les patients atteints d’un cancer n’ont jamais été aussi nombreuses qu’aujourd’hui. Les solutions thérapeutiques se profilant à l'horizon devraient encore venir enrichir les options thérapeutiques actuelles et offrir de nouveaux espoirs aux millions de patients qui, face à ce diagnostic, s'inquiètent pour leur avenir.
La prise en charge multidisciplinaire associant chirurgie, radiothérapie et thérapie médicamenteuse permet d’obtenir une guérison chez de nombreux patients atteints d’un cancer à un stade précoce. Même dans certains types de cancers avancés, il est possible d’obtenir de longues rémissions assimilables à des guérisons. Les cellules tumorales sont alors éliminées et ne réapparaissent pas pendant une période de 3 à 5 ans, voire 10 ans, selon le type de cancer et son degré d’agressivité. Toutefois, ce n’est pas le cas pour la plupart des cas de cancers avancés et nous savons que certaines tumeurs peuvent réapparaitre même au-delà d’une période de rémission de 10 ans.
Que peut bien représenter cette période pour les patients en rechute ? Trouvent-ils que leur vie a été relativement normale pendant ces années ? Pourrait-on considérer qu’ils ont vécu avec une affection chronique ? Ces interrogations pourraient être le point de départ d’une réflexion sur la façon dont nous envisageons la notion de « guérison » et sur les résultats à attendre dans le cadre du traitement d’un cancer.
On pourrait peut-être comparer la situation à celle des patients vivant avec le VIH. Dans les années 1980 et jusqu’au début des années 1990, le diagnostic de séropositivité au VIH sonnait comme une sentence de mort quasi certaine en raison de l’absence de traitements efficaces. Depuis l’arrivée des inhibiteurs de protéase au milieu des années 1990, suivie de près par le lancement de plusieurs autres types de traitements, le VIH ne constitue plus une sentence de mort mais une affection chronique, qui n’empêche pas les patients atteints de vivre une existence relativement normale.
Alors pourquoi ne pas avoir le même objectif avec les cancers qui s’y prêtent ? Ainsi, on peut voir que le véritable enjeu est de définir ce qu’on considère comme un résultat satisfaisant. Si nous demandions aux professionnels de santé, autorités réglementaires, patients et autres acteurs concernés de décrire le bénéfice attendu d’un traitement anticancéreux, nous entendrions toutes sortes de réponses différentes.
La première réponse qui vient à l’esprit de la plupart des gens est généralement une diminution de la charge tumorale. Mais l’essentiel reste la définition des résultats utilisés lors de l’enregistrement des nouveaux médicaments et de la validation des autres types de traitements ; les résultats attendus sont un prolongement de la survie des patients atteints de cancer et le prolongement de la survie des patients sans progression du cancer. Ces critères n’impliquent pas nécessairement une disparition de la tumeur. Dans la plupart des cas, ils signifient que le patient continue de vivre, malgré la maladie, avec un cancer chronique.